Logiciels de navigation

Cet article présente les principales fonctions d'un logiciel d'aide à la navigation. Notre but est de permettre aux plaisanciers de juger si un tel outil peut leur être utile. Cet article ne remplace absolument pas le manuel d'utilisation du logiciel. Pour rester concis et ne pas risquer de lasser nos lecteurs, nous n'avons pas mentionné des dizaines de fonctions utiles (visualisation et insertion de photographies associées au trajet, prise de notes et tenue d'un journal de voyage, visualisation des identificateurs AIS, etc.) , préférant ne mentionner que l'essentiel.

Au delà du simple GPS

Tout le monde ou presque connait les GPS de voiture qui nous guident jusqu'à l'adresse choisie avec des instructions graphiques et par synthèse vocale. Ces petites merveilles de l'électronique moderne ont deux limites bien connues : elles ne permettent pas (ou très mal) de planifier un voyage en choisissant sa route parmi un ensemble de possibilités en comparant pour chacune d'entre elles les coûts, les durées prévisibles, les difficultés à prévoir. De plus, rares sont encore les GPS autonomes qui reçoivent en temps réel les annonces des incidents qui surviennent sur le réseau routier (accidents, fermetures de sections pour travaux, etc.) et peuvent ainsi proposer une replanification de la route en cours de parcours.

Les logiciels d'aide à la navigation fluviale sont beaucoup plus sophistiqués. Ils présentent quatre différences majeures :

    • Ils sont conçus pour être exécutés sur n'importe quel micro-ordinateur portable sous système d'exploitation Windows (pour un Macintosh, voir dernière section sur le matériel);

    • Ils offrent des fonctions très évoluées pour préparer son voyage, comparer les routes possibles, les visualiser sur la carte et sur des photographies aériennes;

    • Lorsque l'ordinateur est connecté à internet (typiquement le soir à l'étape, grâce à une connexion wifi ou 3G), ils reçoivent les avis à la batellerie, et permettent la replanification de la route au cas où des difficultés surviendraient sur celle prévue;

    • L'aide à la navigation est graphique : sur un navire, le barreur a le temps de regarder un écran, et la synthèse vocale est donc inutile.

Cet article vous présente le logiciel d'aide à la navigation fluviale PC-Navigo de la société Noordersoft. Il en existe d'autres, tel que Navigis River de la société Tresco. Je n'ai aucune expérience de ces autres produits, je n'en parlerais donc pas, et ne ferais aucune comparaison entre eux.

Préparation du voyage

Mettre à jour et paramétrer le logiciel

Pour fonctionner, un logiciel d'aide à la navigation à besoin d'informations à jour sur le réseau fluvial. Les cartes électroniques sont distribuées au format normalisé ECDIS par les agences gouvernementales responsables de la cartographie du réseau dans chaque pays. Elles sont gratuites pour la plupart des pays d'Europe (France, Belgique, Hollande, etc.). Elles sont payantes pour l'Allemagne. Lorsque vous commandez le logiciel Navigo dans sa version "Europe" vous recevez sur le CD l'ensemble des cartes à jour au moment de la commande. L'éditeur du logiciel publie de temps en temps (une ou deux fois par an environ) des mises à jour de ces cartes, disponibles sur son serveur web en téléchargement gratuit (payant pour l'Allemagne).

Pour la version Navigo Europe que j'utilise, la cartographie couvre réellement toute l'Europe, y compris le Danube jusqu'à la mer noire (certaines cartes sont à télécharger depuis le site de l'éditeur Noordersoft). Les cartes électroniques sont accompagnées d'une base de données qui contient toutes les informations utiles sur les voies d'eau : balisage, caractéristiques des ouvrages, courants, etc. Cette base de données est mise à jour en même temps que la carte qu'elle décrit.

Les avis à la batellerie doivent être mis à jour très fréquemment, une fois par semaine environ. Lorsque votre ordinateur est connecté à internet, Navigo vérifie si les avis dont il dispose sont à jour, et dans le cas contraire vous propose de télécharger les mises à jour. Celles-ci concernent tous les pays couverts par le logiciel, c'est à dire en pratique toute l'Europe.

Le seul paramétrage que vous devez réaliser vous-même concerne les caractéristiques de votre bateau. Navigo va planifier les routes en tenant compte des caractéristiques des voies d'eau, des avis à la batellerie, et des caractéristiques de votre bateau. La boite de dialogue de paramétrage permet de choisir les dimensions du bateau, ses horaires d'exploitation habituels, sa consommation de carburant aux différents régimes moteur, et sa vitesse de croisière en eau calme.

Si vos heures de départ et d'arrêt réelles sont différentes de celles prévues dans vos paramètres d'exploitation, le logiciel vous alertera sur les "dépassements d'heures" (partir avant ou s'arrêter après l'heure prévue), et votre planification deviendra un peu imprécise, ce qui n'est en général pas bien gênant pour un plaisancier.

Choisir sa route

Le logiciel étant convenablement installé, mis à jour et paramétré aux caractéristiques de notre bateau, nous pouvons maintenant planifier précisément des routes fluviales en Europe. Cela se fait en choisissant un point de départ (Conflans-Saint-Honorine dans notre exemple), une destination (port de plaisance de Jambes à Namur), et une date prévue de départ qui sera le lundi 18 avril 2011 dans notre exemple. Ces choix étant fait, le logiciel montre immédiatement la route optimum (la plus rapide) compatible avec les caractéristiques de mon bateau. Il s'agit ici de la route par l'Oise, le canal du Nord, le canal Nimy-Blaton-Péronnes, la basse Sambre et la Meuse. Étant donné les horaires d'exploitation indiqués dans mes paramètres (10H - 17H) et les chômages connus au moment ou la planification est calculée, Navigo m'annonce une date prévue d'arrivée pour le 27 avril 2011 à 13 heures.

Cette route ne me plait pas du tout. Je demande au logiciel de me calculer une route "touristique". Il butte alors sur une difficulté, la fermeture du canal de la Sambre à l'Oise depuis 2006 jusqu'à une date indéterminée :

Il me reste alors à indiquer la route qui me semble la plus intéressante pour le plaisancier que je suis : celle qui passe par l'Aisne puis par le canal des Ardennes. J'indique cette route très simplement en introduisant des points de passage par Soissons, Rethel et Charleville-Mézières. Ceci se fait très simplement en utilisant l'onglet "via" situé à droite de la carte.

Navigo me calcule alors la route souhaitée et me prédit une arrivée le 30/04 à 13 heures, soit trois jours de plus que la route optimum, ce qui n'est pas cher payé pour éviter les nuisances du canal du Nord et la traversée des usines de Charleroi !

Visualiser la route (vues aériennes)

La route de Namur via le canal des Ardennes me semble une bonne hypothèse. Je décide donc de regarder de plus près les endroits traversés pour repérer des haltes agréables et surtout les zones à éviter qu'il s'agira de traverser le plus rapidement possible : grandes zones industrielles, endroits où le canal longe l'autoroute ou la voie ferrée, etc. Pour cela, j'utilise la fonction "exporter" de Navigo qui génère alors un fichier au format kml, fichier qui va pouvoir être chargé dans Google Earth. Cette application gratuite, proposée par Google, permet de visualiser à peu près tout le globe terrestre sous forme de photos satellite et aériennes.

Utilisée pour la navigation, elle permet de voir tout un trajet calculé par Navigo, avec les ouvrages fluviaux repérés. Je vois par exemple que si je veux profiter de ce voyage pour visiter la cathédrale de Soissons (la seule cathédrale gothique dissymétrique à une seule tour !) le quai le plus proche semble être un arrêt de bateaux à passagers situé tout prêt du centre ville :

Mon passage à Soissons étant prévu en avril, je suis quasiment certain qu'il n'y aura pas de bateau à passagers en cette saison. A défaut, le quai Saint-Waast semble aussi utilisable, quoique situé plus loin de la cathédrale. Je peux donc planifier quelques heures d'arrêt pour visiter cette ville.

Google Earth me permet ainsi de visualiser tout le trajet : ouvrages, haltes nautiques et ports, etc.

Note : le choix de la route (étape 2) se faisait avec une machine non connectée à Internet. En revanche, la visualisation avec Google Earth nécessite évidemment une connexion active au réseau.

Étudier et modifier le plan de route

Ayant repéré et noté grâce à Google Earth les bonnes étapes et les vilains passages de ce voyage, je peux revenir à Navigo pour affiner mon plan de voyage. Par défaut, Navigo calcule les étapes en les calant sur l'ouvrage (écluse), la halte ou le quai situé au plus prés de l'endroit où se trouvera le bateau à l'heure indiquée dans les paramètres comme fin de journée (fin d'exploitation). Cette méthode convient bien à un marinier qui cherche à parcourir le plus de trajet possible sur sa journée de travail, mais ne convient évidemment pas à un plaisancier. Je vais donc reprendre le plan de route théorique calculé et introduire là où je le souhaite des arrêts de la durée qui me convient. Le plan de route calculé par le logiciel prévoit un passage à Soissons le 21/04 vers 11H20 :

Je vais indiquer un arrêt de trois heures à Soissons :

Le plan de voyage intègre alors cette pause. Je peux procéder de même pour toutes les pauses et étapes. Le plan de voyage ainsi modifié pourra être sauvé sous forme de fichier bureautique (.xsl ou .doc ou .html), et imprimé pour servir de routier pendant le trajet.

Guidage en route

En route, notre ordinateur de bord étant connecté à une antenne GPS (voir section "matériel" ci-dessous), Navigo indique en permanence la position du navire et donne tous les renseignements utiles sur les ouvrages qui se présentent.

L'image suivante correspond au passage de l'écluse de Venette à Compiègne. En haut à droite, apparaissent toutes les caractéristiques du bief dans lequel nous nous trouvons (en l'occurrence, le bras de Venette sur l'Oise) : dimensions maximales autorisées, courant et hauteur d'eau moyenne à la date du jour. En dessous, le kilométrage parcouru depuis le départ (Conflans-Sainte-Honorine dans notre exemple) et celui restant à parcourir jusqu'à notre destination. Plus bas, les caractéristiques de l'écluse que nous utilisons : dimensions du bassin, chute, canal VHF.

En cliquant sur le bouton "Horaires" le logiciel me fournit les horaires de fonctionnement de l'ouvrage :

En mode navigation, par défaut, l'écran reste centré sur la position courante du bateau, un petit vecteur vitesse indiquant la position exacte. Les caractéristiques des ouvrages apparaissent quelques centaines de mètres avant que l'on arrive à leur hauteur, permettant ainsi au navigant de se préparer et si nécessaire d'appeler par VHF ou téléphone le service responsable (éclusier, subdivision VNF ou centrale nationale VNF en France, ou leurs homologues dans les autres pays).

Il est également possible de faire apparaitre la liste des points et ouvrages de la route, et en cliquant sur l'un d'entre eux de recentrer la carte sur ce lieu et obtenir les informations qui le concerne :

Choix du matériel

Un logiciel d'aide à la navigation fluviale (Navigis ou Navigo) tourne sur n'importe quel ordinateur portable moderne doté d'une mémoire vive confortable (processeur à 1,8Ghz, 1 ou 2 Go de RAM par exemple). Un écran de 15 pouces convient parfaitement. Les portables équipés de très grands écrans (17 pouces ou davantage) sont souvent trop encombrants pour être placés à bonne hauteur devant les yeux du barreur sans gêner la vue vers l'extérieur. Les "netbooks" à écran de 12 pouces sont tout à fait utilisables et sont moins encombrants. Un critère de choix important est la qualité de l'écran qui doit pouvoir rester lisible en pleine lumière du jour.

Les macintosh Apple sont utilisables grâce au programme d'émulation Windows dont ils disposent. Les modèles modernes (double cœur) sont suffisamment rapides pour que l'émulation Windows soit efficace.

Le logiciel peut être installé sur plusieurs ordinateurs, la protection étant assurée par un dongle amovible. Le changement d'ordinateur pour un utilisateur se fait donc sans douleur.

L'antenne GPS peut être une antenne de toiture fixe ou prendre la forme d'un petit boitier rond qui sera posé sur le toit de la marquise ou sur le roof avant pendant la navigation. Ce type d'antenne, très pratique, se connecte à un port USB de l'ordinateur. Elle vaut entre 45 et 80 €, les moins chères souffrant malheureusement d'un manque de fiabilité.

Le budget total d'équipement se situe donc, selon les options choisies entre 790 et 2000 € environ, le plus gros achat étant le micro-ordinateur portable que la plupart des plaisanciers possède déjà.

Au total donc, hors achat de l'ordinateur, on peut pour environ 480 euros s'équiper d'un logiciel d'aide à la navigation très performant, extrêmement sécurisant pour la navigation dans des zones complexes et/ou peu connues, et qui permet en outre une planification fine d'un long voyage dans toute l'Europe de la Baltique à la Mer noire.

Pour ce qui me concerne, je dispose de deux logiciels d'aide à la navigation, Scannav pour la navigation maritime, et Navigo Europe pour le fluvial, et je n'envisagerais plus de m'en passer.